Ce défi a eu lieu dans un contexte assez singulier.
Mon ami Lilian Alvarez m’a convié à Ibiza pour interviewer Andrey Ternovskiy, l'excentrique créateur de Chatroulette.
Qui dit Ibiza, dit fiesta. Alors, pour arranger mon mal de tête, j’ai eu la fausse bonne idée d’apprendre à réciter l’alphabet à l’envers en moins de 3 secondes.
Rassurez-vous.
C'est nettement plus facile qu'on ne pourrait le croire, une fois que l'on a compris le principe. Dans une dizaine de minutes, vous pourrez parier à vos amis que vous en êtes capables.
Comme ce défi semblait trop simple, je m'en suis fixé un autre : celui de réciter l'alphabet en alternant la première lettre, puis la dernière, puis la deuxième, et ainsi de suite.
Comme ceci : AZBYCXDWEV…
Évidement, en moins de 3 secondes.
Une interrogation persiste : quel est l'intérêt de ce défi ?
J'y trouve trois justifications pour l'injustifiable :
- Éprouver et stimuler sa flexibilité mentale.
- Essayer une nouvelle technique de mémorisation.
- Avoir une bonne excuse pour parler de l'histoire de l'alphabet.
Si vous préférez le format vidéo, voilà comment je m’y suis pris :
Pour la petite anecdote, j'ai eu une fois un journaliste au téléphone qui pensait que je mentais sur mes challenges. Il n'était pas surpris par la survie dans la jungle ou la plongée en apnée. Ce qu'il n'arrivait pas à concevoir, c'est qu'il était possible de réciter l'alphabet à l'envers aussi rapidement.
Je lui ai fait une démo en live, puis je lui ai appris en quelques minutes, et il m'a pris au sérieux.
Ce qui est marrant, c'est qu'il s'agit du défi le plus facile que j'ai relevé.
Apprendre à réciter l’alphabet à l’envers
Voilà ma méthode (inspirée de celle de Fabien Olicard).
J'ai fragmenté l'alphabet en blocs pour créer des associations sonores :
- ZYX-W (comme on l’entend)
- VUTS (ça se retient tout seul)
- RQPO (de l’air dans le cul, ça fait un pet haut)
- NMLK (ce sont des nems laqués)
- JIHG (un gigot, et vous pouvez fourrer les nems laqués dans le gigot)
- FEDC (le gigot prend feu, et c’est le décès)
- BA
Ensuite, il suffit de retenir la mélodie.
Pour l’alphabet en mode AZBYCX…, nous allons procéder de la même manière.
- AZBYCX (ça sonne juste bien)
- DWEV (idem)
- FUGTHSIR (fuuu, j’étais HS hier)
- JQ (à retenir)
- KPLO (cap pelo ?)
- MN (eh men !)
Pour accélérer la récitation, j'ai ensuite regroupé des blocs pour ne poser ma voix que trois fois :
- AZBYCXDWEV
- FUGTHSIR
- JQKPLOMN
L’histoire de l’alphabet
Je dois vous confesser quelque chose. J'ai surtout relevé ce défi pour me plonger dans les origines des lettres.
D'abord, saviez-vous que le mot alphabet dérive d'alpha et bêta, les deux premières lettres de l’alphabet grec ?
Ensuite, il y a un fait que j'aime beaucoup. L'Histoire débute avec l'invention de l'écriture par les Sumériens. Avant cela, c'est la préhistoire. L'Histoire, c'est donc ce l'on peut lire.
N'est-ce pas poétique ?
Si ce sujet vous intéresse, je laisse Jamy vous expliquer la suite :
« L’idée géniale de l’alphabet, c’est qu’un signe ne correspond plus à un mot, mais à un son. »
Pour les curieux, je vous suggère en complément cette vidéo fascinante sur l’évolution de la transmission de l’information.
Les pangrammes
Un pangramme est une phrase contenant les 26 lettres de l’alphabet.
En voici quelques exemples :
- 32 lettres : Juge, flambez l'exquis patchwork d’Yvon.
- 37 lettres : Portez ce vieux whisky au juge blond qui fume.
- 39 lettres : Voyez le brick géant que j'examine près du wharf.
- 40 lettres : Portefaix, buvez ce whisky limonade que je goûte.
- 54 lettres : Voix ambiguë d'un chœur qui au zéphyr préfère les jattes de kiwis.
En anglais, on a : The quick brown fox jumps over the lazy dog.
Ce n’est pas tout !
Vous avez aussi des pangrammes avec les lettres accentuées (à, â, é, è, ê, ë, î, ï, ô, ù, û, ü, ç) comme :
Portez ce vieux whisky au juge blond qui fume sur son île intérieure, à côté de l'alcôve ovoïde, où les bûches se consument dans l'âtre, ce qui lui permet de penser à la cænogénèse de l'être dont il est question dans la cause ambiguë entendue à Moÿ, dans un capharnaüm qui, pense-t-il, diminue çà et là la qualité de son œuvre.
Ou encore celui-ci de Gilles Esposito-Farèse qui contient les 42 caractères de la langue française :
Dès Noël, où un zéphyr haï me vêt de glaçons würmiens, je dîne d’exquis rôtis de bœuf au kir, à l’aÿ d’âge mûr, &cætera.
Les alphabets
Il existe une multitude d'alphabets.
On peut d’ailleurs s'amuser à retracer leurs ancêtres communs et dessiner une sorte d'arbre généalogique.
C’est ce qu’a fait Françoise Briquel-Chatonnet (historienne française) en 2006, en proposant pour les écritures alphabétiques la chronologie suivante :
Les premiers écrits nous parviennent de la Mésopotamie, entre 3400 et 3000 av. J.-C.
Par exemple, qu’est-ce qui peut bien être écrit sur cette tablette ?
Une idée ?
Réponse : C’est un acte de vente d'un esclave et d'une maison à Shuruppak.
Le mot de la fin
Je laisse le soin de conclure à Victor Hugo :
« Avez-vous remarqué combien l'Y est une lettre pittoresque qui a des significations sans nombre ? – L'arbre est un Y ; l'embranchement de deux routes est un Y ; le confluent de deux rivières est un Y ; une tête d'âne ou de bœuf est un Y ; un verre sur son pied est un Y ; un lys sur sa tige est un Y ; un suppliant qui lève les bras au ciel est un Y. »
PS : Oui, c’est une conclusion intéressée…
