CHALLENGE

Perdu dans les catacombes de Paris

Sans carte ni boussole, avec l'objectif d'en ressortir.

Temps de lecture estimé :
6
min
Publié le
17/2/2022

Je me suis intentionnellement perdu au fond des catacombes de Paris, sans carte ni boussole, avec l’objectif d’en ressortir.

Pour ce challenge, j’étais accompagné par l’explorateur urbain et aventurier Yoann Leroux. Il est notamment connu pour ses vidéos extrêmes sur les toits de Paris.

Habitué des catacombes, il m’a guidé jusqu’au dernier étage, avant de me laisser face à mon destin. Pendant toute la durée, Yoann m’a suivi, sans me donner d’indication. C’était à moi d’explorer, de retrouver mon chemin, et de remonter à la surface.

Disclaimer : Se perdre dans les catacombes sans expérience, sans carte ni boussole, est la pire idée. Il y a près de 300 km de galeries. Là-dessous, il n’y a pas de réseau. Ce n’est pas un jeu.

J’avais emporté de quoi survivre pendant 72 heures. Si, à la fin de mes réserves, je n’étais pas sorti, c’était à Yoann de me remonter.

J’ai réalisé un film de 38 minutes sur cette aventure :

Faire des choix

Droite ou gauche ?

Dès le premier embranchement, un choix s'est présenté à moi : droite ou gauche ?

Au début, je suis passé à trois reprises par le même point de repère sans parvenir à sortir de cette boucle. Puis, j’ai commencé à suivre un itinéraire méticuleusement chaotique, essayant de me perdre tout en quadrillant la zone pour ne pas louper des points d’intérêts.

C’est dans ma nature d’explorateur. Lorsque je joue à un jeu d'aventure, par exemple, je n'avance pas tant que je n'ai pas entièrement exploré la zone. On ne sait jamais quelle surprise peut surgir au détour d'un chemin

The Stanley Parable

Dans la vidéo, je mentionne un jeu qui s’appelle The Stanley Parable.

Il s'agit d'une fiction interactive où le seul gameplay est la navigation. Une voix off omnisciente narre l'aventure d'un personnage nommé Stanley. Le joueur a donc le choix de suivre ou non l'intrigue qui lui est présentée.

Imaginez que vous arrivez dans une salle avec deux portes, et que le narrateur annonce : "Quand Stanley arriva devant deux portes ouvertes, il prit la porte à sa gauche."

Quelle serait votre réaction ?

Lors de ma première partie, j'ai choisi la porte de droite, avant de systématiquement opter pour les directions contraires à celles indiquées. Lors de mon second essai, j'ai suivi à la lettre les instructions du narrateur, terminant ainsi le jeu. Comme il restait de nombreux autres scénarios à explorer, j'ai passé plusieurs heures supplémentaires à découvrir toutes les fins possibles.

J'ai ressenti une sensation similaire dans les catacombes. C'est un endroit unique mais difficile d'accès. Pensant que je n'y retournerais pas de sitôt, j'ai passé plusieurs heures à explorer avant de chercher à retrouver la sortie.

Frameworks de prise de décision

J'aimerais profiter de ce sujet du choix pour vous partager les modèles mentaux que j’utilise pour prendre des décisions.

Si ce n’est pas un “Fuck yes !”, c’est un “Non”.

Si un choix Oui/Non n'est pas évident, mon premier filtre est mon enthousiasme. Si je ne suis pas suffisamment emballé par une idée, alors je cesse de réfléchir : c'est non.

Par exemple, on m'a plusieurs fois proposé de donner des conférences TEDx. À chaque fois, je me suis surpris à ne pas particulièrement aider l’idée, pour des raisons de timing, de lieu ou de focus. J'ai systématiquement décliné.

Posture offensive

Face à un choix, on a deux choix :

  1. Opter pour une posture défensive, en cherchant la sécurité.
  2. Opter pour une posture offensive, en prenant des risques.

Je suis un fervent adepte de la posture offensive.

Quand tout le monde se confinait, je suis parti voyager. Quand je gagne de l’argent, je l’investis. Quand je pars à l’aventure, je cherche les complications.

Je préfère mener une vie large plutôt que longue.

Minimalisme

Depuis 2020, j’explore le minimalisme. Cette philosophie m’accompagne aujourd’hui dans tous les aspects de ma vie, de mes possessions à mes relations, en passant par mes décisions. Je m'efforce ainsi de construire un quotidien débarrassé de toute charge mentale non désirée.

Dans certaines situations, je me demande : “Quelle décision est la plus minimaliste ?”.

Pile ou face (ou presque)

Ainsi, chaque décision passe successivement par ces 3 filtres :

  1. Suis-je enthousiaste ?
  2. Est-ce ambitieux ?
  3. Est-ce minimaliste ?

Lorsque je suis vraiment bloqué et que les réponses ne sont pas évidentes, j’utilise une pièce pour m’en remettre à mon instinct. Oui, mon instinct, et non le hasard.

Pour cela, j'attribue un côté pile, un côté face, puis je lance la pièce. Lorsqu'elle est en l'air, pendant une seconde, j'espère qu'elle tombe d'un côté plutôt que de l'autre. C'est à ce moment-là que je prends ma décision, indépendamment du résultat.

À propos des catacombes

Les carrières de Paris

Sous Paris, près de 300 km de galeries ont autrefois été utilisées pour l'extraction de la pierre à bâtir. Paris s'est ainsi construit pendant plusieurs siècles sans importer d'autres matériaux de construction.

Elles sont constituées de deux réseaux principaux :

  1. Le grand réseau sud ou GRS, qui s'étend sous les 5e, 6e, 14e et 15e arrondissements
  2. Le « treizième », plus petit, qui s'étend sous le 13e arrondissement.

La fréquentation de ces carrières est interdite par l'arrêté préfectoral du 2 novembre 1955, et punie d'une amende entre 60 € et 375 € par l'Inspection Générale des Carrières. Dans le jargon, on appelle ceux chargés de surveiller les carrières souterraines de Paris les “cataflics”.

Plus grave, repartir avec des ossements constitue une violation de sépulture au regard de la loi, peine punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

Seule une petite partie galeries (environ 1,7 kilomètre) constitue l'ossuaire officiel ou musée des catacombes de Paris, mais il existe d’autres ossuaires dans le GRS. Dans le film, vous en découvrirez plusieurs.

On assimile abusivement les catacombes à l'ensemble des carrières de la capitale, bien qu'elles n'en représentent en réalité qu'une infime fraction.

Cimetières en détresse

Les guerres, les épidémies et les famines ont apporté toujours plus de cadavres à inhumer dans des espaces restreints, ce qui a rendu leur décomposition de plus en plus difficile.

À la fin du XVIIIe siècle, le sol du cimetière des Saints-Innocents se situait à plus de deux mètres au-dessus du niveau de la rue, entraînant des problèmes d'insalubrité.

Un chroniqueur de l’époque rapportait que dans le quartier, le vin tournait au vinaigre en moins d'une semaine et que la nourriture se gâtait en quelques jours. L'eau des puits était elle aussi contaminée par des matières putrides, propageant des maladies.

Face à cette situation alarmante, la municipalité de Paris ordonna de vider les cimetières de leurs occupants en transférant les restes de six millions de personnes dans les anciennes carrières abandonnées de la ville. Les ossements furent alors déplacés, jetés dans des puits d'extraction de pierres et disposés dans les différentes salles. Ainsi naquirent les catacombes.

Anecdotes sur les catacombes

Durant la Seconde Guerre mondiale, les Résistants utilisaient les catacombes pour se cacher des Nazis. Plus récemment, en 2004, la police a découvert un cinéma entièrement équipé dans une partie non officielle des catacombes.

En 2017, des voleurs ont réussi à accéder à une cave à vin privée située sous un appartement de luxe parisien en creusant un tunnel à travers les catacombes. Il ont dérobé plus de 300 bouteilles, pour une valeur estimée à environ 250 000 euros.

Depuis leur création, les catacombes suscitent la curiosité. Des empereurs qui y descendirent jusqu’à la scène underground actuelle, qui sait ce qui a bien pu se passer pendant des siècles sous Paris.

Sur le trône d’os du gardien des morts.
Ulysse Lubin signature

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